Vice-championne d’Europe (-52 kg) : Priscilla Gneto « J’ai vraiment souffert »

Publié le : 13/07/2016 11:37:22
Catégories : Actualités , judo

Vice-championne d’Europe (-52 kg) : Priscilla Gneto « J’ai vraiment souffert »

Dire qu’elle revient de loin est un doux euphémisme ! Affirmer que son timing est parfait l’est tout autant. Son unique podium depuis son bronze olympique en 2012 ? Une médaille d’argent aux Championnats d’Europe… 2016 !

Avec ses blessures, ses opérations, ses doutes, ses contre-performances et une concurrence acharnée avec Annabelle Euranie, Priscilla Gneto ressemble à une rescapée. Il y a encore un an, les JO de Rio s’apparentaient à une chimère. Le 7 août, la Française va débouler sur les tapis cariocas pour chercher l’or.

Par Ludovic Mauchien

 

A 21 ans, elle remportait une médaille de bronze olympique. L’avenir s’annonçait dorée. A 23 ans, elle voyait cependant poindre le doute, enchaînait problèmes sur problèmes. A 25 ans (le 3 août), Priscilla Gneto va disputer ses 2e JO (-52 kg) après avoir surmonté moult épreuves.

La dernière en date, et non la moindre, la concurrence haut de gamme d’une autre surdouée, Annabelle Euranie, revenue si brillamment du Diable Vauvert qu’elle surclassait sa cadette au ranking mondial il y a encore peu. Pour Gneto, c’était chaud pour Rio… Mais le propre et la marque d’une grande championne est d’être prête au moment où il le faut. Et, sur ce point, difficile de faire mieux que Priscilla Gneto !

Championne du monde et d’Europe par équipe en 2011, 3e des JO 2012 et puis… Quasi plus rien pendant deux ans, juste deux podiums en Grand Slam. Elle lance une première banderille fin 2014 en remportant son 2e titre de championne de France (après celui de 2011). Dans la foulée, elle accroche quatre 3es places en Grand Slam au cours de l’année 2015. Mais la pétillante médaillée de bronze 2012 a perdu de son éclat.

 

Dominer la « Riner » du Judo féminin

 

Elle va retrouver la lumière à point nommé. 3e au Grand Slam de Paris en février (cependant dominée par Euranie en ¼ de finale), elle accroche son 1er podium en championnat international depuis 2012 à l’occasion des Championnats d’Europe organisé fin avril. C’était celui qu’il ne fallait pas manquer. Elle a été au rendez-vous.

Battue en finale par la double championne du monde (2013, 2014), la Kosovar Kelmendi, Priscilla Gneto remporte une belle et salvatrice médaille d’argent. Anabelle Euranie, de son côté, s’incline en ½ finale face à la même Kelmendi et, surtout, perd son combat pour la médaille de bronze. Priscillo Gneto va voir le Corcovado.

Affûtée comme elle ne l’a pas été depuis longtemps, la Française figure logiquement parmi les prétendantes au podium. Pour se parer d’or, il lui faudra cependant surmonter une nouvelle épreuve de taille : dominer la « Riner » du Judo féminin, Majlinda Kelmendi (1 défaite en 57 combats depuis 2013 !).

Mais Priscilla Gneto fait partie des quelques Judokates qui sont parvenues à faire chuter la Kosovar. C’était certes en octobre 2011 et, depuis, la Française s’est inclinée à 4 reprises, mais elle a retrouvé son sens du timing, qu’elle devra consommer sans modération sur les tapis cariocas.

 

« Je ne l’ai pas volée, cette sélection »

 

Quand tu as appris ta sélection pour les Jeux, quel sentiment a-t-il prédominé ? Le soulagement, la joie ?

La joie et le soulagement (elle rit). La joie parce que j’ai obtenu une sélection olympique. J’éprouve aussi un sentiment de fierté car je ne l’ai pas volée. J’ai travaillé dur. Cela n’a pas été facile. J’ai vraiment souffert pour l’obtenir. J’avais une année devant moi pour y parvenir. J’ai tout misé sur cette dernière année. Au final, accomplir cette 1ère étape me rend super contente. Ce fut un sentiment de soulagement et encore plus de bonheur car cela faisait 4 ans que je l’attendais. A l’annonce, j’étais super heureuse. Et, là, c’est le début des emmerdes (elle éclate de rire). On va effectuer une grosse phase de préparation. Il faudra répondre présent. Si tel est le cas, ce ne sera que du bonheur à Rio.

 

Comment as-tu vécu cette concurrence avec Annabelle Euranie ?

Au début, c’était difficile car je n’y avais pas été confronté auparavant. Au final, cela a vraiment été attractif. J’ai dû me surpasser à chaque fois, être dans le stress et dans « l’obligation de » à chaque sortie…

Au départ, je ne pensais pas que cela allait autant me servir. Au final, j’y ai trouvé mon compte. Je me surpassais à chaque compétition. Et j’ai réalisé une saison comme je ne l’avais encore jamais fait.

 

« Annabelle, c’est une superbe championne »

 

As-tu connu des moments de doute ?

Oui, j’en ai eu beaucoup, notamment après mes blessures, après mes retours d’opération et, surtout, quand j’ai eu un manque de résultats évident. C’était compliqué parce que je me demandais si j’allais revenir au niveau, si j’allais réussir. Heureusement, grâce à mon entourage qui avait encore plus confiance en moi que je ne l’avais, j’ai su reprendre confiance et rebondir.

 

Qu’as-tu envie de dire à Annabelle (Euranie) ?

Que c’est une superbe championne. Je la félicite pour ce qu’elle a réalisé à son retour. C’est vraiment un beau parcours. Il n’y en a pas beaucoup qui aurait été capable de faire ce qu’elle a fait. Et je la remercie de m’avoir poussé au bout (elle rit).

 

En quoi ton expérience des JO 2012 à Londres va-t-elle te servir ?

Cela va m’aider dans le sens où, comme j’ai déjà fait les Jeux une fois, j’ai une vision de l’ampleur de l’événement. Le fait d’avoir ramené une médaille me fait aussi dire que, comme je l’ai fait une fois, je peux le faire deux fois !

 

« Etre conquérante de la 1ère à la dernière seconde »

 

Que t’avait-il manqué en 2012 pour passer de la médaille de bronze au sacre olympique selon toi ?

Je pense que, sur le combat que je perds en ¼ finale à Londres (contre la Nord-Coréenne Kum Ae An, 2e aux JO 2008, 1ère en 2012), j’étais un peu trop jeune et impressionnée. Je n’avais pas conscience de mes capacités. Quand j’y suis allée, je la regardais ne me disant : « ah, ouais, quand même, elle est costaud ». Et, au fur et à mesure du combat, je me suis rendue compte que ce n’était pas impossible de la battre, que j’avais son niveau. Mais c’était trop tard. J’aurais dû me le dire dès le début. Ce doute m’a fait prendre la pénalité d’écart. C’est quelque chose que je ne reproduirais pas. Il faut être conquérante de la 1ère à la dernière seconde.

 

Quels sont les souvenirs de Londres qui jaillissent là, à cet instant T ? 

Ma famille, avec laquelle j’ai partagé ce moment, mes amis, mes entraîneurs, tous ceux qui sont venus me voir, et aussi ce dernier combat pour le bronze (face à la Belge Heylen). Je ne me rappelle que de celui-ci d’ailleurs. Et, enfin, quand on s’est tous retrouvés au Club France pour fêter cet instant avec tous ceux qui étaient venus m’accompagner.

 

Qui crains-tu le plus à Rio ? Toi-même ou tes adversaires ? 

Je dirais moi-même car… Je suis bizarre (elle éclate de rire), dans le sens où c’est tout ou rien. Il faut que j’arrive à m’enlever des doutes de la tête, que je parvienne à rester concentrée du début à la fin, que j’arrive à avoir archi-confiance en moi. Réunir tous ces paramètres en un jour, ça fait beaucoup (elle rit de nouveau). Mais il va falloir que j’essaie d’être en parfait accord avec moi-même et ça ira.

 

« Je suis dans la meilleure des formes »

 

Tu as battu la Kosovar Kelmendi, l’archi-favorite du tournoi, une fois en cinq oppositions. Quelle avait été la clé ce jour-là ?

C’était à la Coupe d’Europe par équipe des clubs (octobre 2011). J’étais détendue. C’était une toute autre ambiance, un autre climat. Je ne me suis pas posée de question. J’y suis allée pour mon club, je n’avais pas de pression sur les épaules. Dans les autres combats face à elle, j’étais aussi dans cet état d’esprit. Mais il y a eu des phases où j’ai régressé. En ce moment je suis dans la meilleure des formes. J’espère en tirer profit à Rio.

 

Elle t’a dominée en finale des derniers Championnats d’Europe. Qu’as-tu retiré de ce combat ?

J’ai appris certaines choses. Je menais de deux pénalités dès le début. Elle est remontée au score. Malheureusement, le Judo fait que j’ai fait une erreur et j’ai pris (elle perd sur Ippon).

Mais j’ai beaucoup appris sur les mains. Quand j’étais à fond offensive, elle pouvait plier. Il fallait quand même aller les chercher ces deux pénalités ! Je sais qu’il faut que je sois agressive dès le début, ne jamais me relâcher et rester concentrée jusqu’à la fin

 

« Le stage à la Légion… J’ai adoré ! »

 

A un mois des JO, quel est ton état d’esprit ?

Je monte en puissance. J’ai profité des deux dernières semaines de juin pour beaucoup souffler, même si j’ai beaucoup travaillé au stage de St-Cyprien (2e quinzaine de juin). L’année a été très, très longue et la fatigue commençait à se faire ressentir.

On est en stage en Espagne début juillet, on a 5 jours de repos puis on est à Montpellier pour 10 jours. On revient ensuite à l’INSEP pour finaliser. Je compte mettre les bouchées doubles, histoire de faire deux semaines à une intensité maximale, à fond. Puis, la dernière semaine de juillet, je vais souffler un peu.

 

Début juin, l’équipe de France a effectué un stage de cohésion en Corse, avec la Légion. Comment l’as-tu vécu ?

C’était cool, d’autant plus que c’était en Corse et que je retournais dans un climat connu (elle a grandi à Porto-Vecchio). Cela changeait des autres activités que l’on a pu faire. Et on a eu la chance de visiter l’armée de l’air et la marine.

On a été accueilli en Corse par la Légion Etrangère. Ils ont vraiment été géniaux avec nous. Cela n’est pas donné à tout le monde ! On a en face de nous des gens extraordinaires. Ils nous ont beaucoup appris, comme si on était de leur famille. Ils ont été très sympas, très chaleureux. Ils nous ont fait partager des expériences que l’on en vivra plus jamais. Moi, j’ai adoré. Il m’a juste manqué un peu de sommeil, un lit douillet et… Des douches plus longues (elle rit). A part ça, c’était génial (elle rit encore).

 

 

Portrait chinois

 

Une qualité : la générosité

Un défaut : têtu

Une couleur : le bleu

Un plat : Les petits plats africains de ma mère

Une boisson : le jus de citron sucré

Un animal : un chiot

Un végétal : l’Hibiscus

Un livre : Million dollar Baby de FX Toole

Un instrument de musique : la guitare

Une chanson : Work, work, work (Rihanna)

Un film : le plus beau des combats

Une série TV : J’en ai plein ! Walking dead, Scandal…

Un loisir : shopping, cinéma et voyage

Une personnalité : ma maman et mon papa

Un champion : Mike Tyson

Un lieu : la Corse et Abidjan

 

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